Oui, mais … Spécialisée en quoi ?

Qui a eu cette idée folle …

De nous exempter d’école. De mon temps hein, on aurait été à l’école coûte que coûte, à coeur vaillant rien d’impossible. Aujourd’hui, la jeunesse c’est plus ce que c’était.

Enfin une catégorie psycho-sociale résiste encore et toujours à l’envahisseur. Je veux parler de tous les établissements type IME (Institut Médico Educatif) ITEP (Institut Thérapeutique, Educatif et Pédagogique), MECS (MAison d’Enfants à Caractère Social), FAM (Foyer d’Accueil Médicalisé) ou encore IDMC (Institut de Mon Cul). Oui, car nous, apparemment, y’a un bouclier empêchant les maladies de passer. On vous donnera la recette pauvres mortels. Quand on l’aura …

Sous couvert d’un léger ton ironique, en vrai, je suis fâchée, et donc je vais être un peu plus sérieuse. Nous accueillons, par définition, des usagers fragiles. Des usagers qui ne peuvent pas toujours nous dire quand ils se sentent pas bien, et qui ne peuvent compter que sur notre bon sens pour être pris en charge. Nous, on est là pour ça. Je pourrais dire « on est payés pour ça », mais la vérité, c’est que le social c’est censé être une vocation. Donc on fait ce métier pour la gloire on ne va pas se mentir.

M’enfin là, à part prendre le risque important de tomber sérieusement malade avec un virus excessivement contagieux, je commence à avoir du mal à discerner les merveilleux côtés dans notre profession. Parce que le Président de la République, quand il parle de « personnes handicapées », apparemment c’est pas clair pour l’Agence Régionale de Santé, qui préfère nous laisser dans notre caca, on semble être tellement bien dedans.

Hé oui, nous accueillons une population particulièrement fragile, et pour autant, nous avons l’obligation de rester ouverts. Pour d’obscures raisons. Et je ne vais pas vous mentir, la perspective de ne pas être payés si on exerce un droit de retrait a tendance à calmer nos ardeurs militantes. Donc en attendant on bricole. Pour éviter la contamination, nous demandons aux parents de garder leurs enfants à domicile. Mais nous ne pouvons fermer l’établissement. Nous allons donc continuer à venir au travail, alors que le risque de contamination est toujours présent. Pas de télétravail pour les travailleurs sociaux ; imaginez vous devant un ordinateur à demander à un petit autiste de ne pas jouer avec ses crottes de nez parce qu’il risque de contaminer ses parents. Oui, non on ne va pas faire ça !

Sans parler de tous ceux qui sont en internat. Ici, pas le choix, les éducateurs doivent relever leurs manches, mettre leurs vies de côté et aller s’occuper de tous ces petits opprimés qui n’ont rien demandé à personne.

La question qui se pose tout de même, c’est comment on peut en arriver à ignorer une telle partie de la population. Comment à un moment, personne au gouvernement ne s’interroge sur la prise en charge de ces personnes, particulièrement fragilisées par la vie. Comment on peut aussi nous demander à nous, professionnels, d’aller au front face à des personnes qui n’ont pas la possibilité de comprendre pourquoi on doit « dabber » en toussant, ou pourquoi on ne peut plus se faire de « câlin » ou même se serrer la main. La violence à laquelle nous sommes confrontés lorsque nous comprenons que nous ne comptons tout simplement pas dans l’esprit des gens est inouïe.

Récemment, le ministre de l’Education Nationale a déclaré, à quelques détails près, qu’il « était le ministre de tous les enfants ». Visiblement, dans tous les enfants, y’a pas les « abîmés ». Juste ceux qui font propre. Bien. Qui montre à quel point notre relève est brillante. On laisse dans l’ombre les déglingués. C’est moins joli à voir.
Donc finalement, on est où là dedans ? On ne compte pas pour l’Education Nationale, on dépend d’un obscur département au ministère de la Santé et des Affaires Sociales. Celui qui change de nom au gré des gouvernements.

Le pire étant que visiblement tout est fait au petit bonheur la chance : certains établissements ferment complètement pour limiter la propagation, d’autres restent ouverts pour … bah je ne sais pas trop d’ailleurs, faudra m’expliquer leurs motivations. Certains parlent de service minimum, d’autres sont carrément au rang d’entreprise et nous parleraient presque de chiffres d’affaire, de tourner à pertes. On a beau sortir des textes de loi, montrer que légitimement, notre santé est en danger imminent face à une maladie, personne ne semble s’en inquiéter. La réponse ? « Oui mais les prix de journée… ». Ha pardon, j’avais oublié que dans notre société, le travail c’est la santé.

Je m’interroge, je râle, je me perds dans mes propos, je le sais. Mais peut être que si tout le monde tenait la même conduite, l’ARS et le gouvernement, sous la pression, céderaient à notre bon sens. Je vous laisse en juger dans les commentaires …

Sacré Charlemagne.

 

 

13 mars, 2020 à 18:57


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